Jacques

Majorelle

 
 

Nancy, 1886

Paris, 1962

 

Jacques Majorelle a perpétué une tradition familiale d'artistes en se consacrant à la peinture, inspirée par la vie marocaine et les femmes africaines. Ses jardins, toujours luxuriants, perpétuent à Marrakech l'image de ce grand passionné du Maroc.

Fils de Louis Majorelle, ébéniste d'art, célèbre pour ses créations de meubles style Art Nouveau, Jacques est né à Nancy le 7 mars 1886. Il est élève à l'Ecole nationale des Beaux-arts de Nancy; puis à Paris où il fréquente l'Académie Julian. Il expose pour la première fois à Paris en 1906.

Souffrant d'une maladie pulmonaire, Jacques Majorelle recherchait les climats chauds et secs. Entre 1910 et 1914, il séjourne en Espagne, à Venise, en Egypte. De chacun de ses périples, il rapporte des toiles.

Réformé, il passe la première guerre mondiale en Bretagne, en Suisse et sur la Côte d'Azur. Bénéficiant de l'appui des autorités françaises, dont celle du maréchal Lyautey(1), il part pour le Maroc en 1917 et s'installe à Marrakech. C'est là qu'il va puiser son inspiration. Lui qui venait du froid, découvre une ville écrasée par le soleil, une lumière faite de contrastes et de couleurs chatoyantes. Il restera toute sa vie "dans cette ville immense langoureusement étalée au pied des cimes neigeuses". Il peint les souks, la vie quotidienne . La poussière joue un rôle majeur dan; ses tableaux. Elle saupoudre toutes les scènes d'une atmosphère de rêve. Il expose régulièrement. La critique est élogieuse. Il devient le peintre du Maroc.

Amoureux des plantes, il achète en 1923 un jardin dans la palmeraie et s 'y fait construire une maison dans le style mauresque. Le jardin sera progressivement aménagé. Fasciné par les paysages du Sud, il entreprend des expéditions dans des contrées inexplorées ce qui lui vaudra d'être nommé chevalier de la Légion d'honneur "pour ses études remarquables jusqu'alors inconnues". Dès son arrivée à Marrakech, Jacques Majorelle avait décidé de créer un art décoratif nouveau s'inspirant de la tradition et qui serait réalisé à partir de produits régionaux et exécuté par une main d'œuvre locale. Des ateliers sont installés derrière sa villa et gérés par son épouse Andrée. Ils prospèrent très vite cuirs d'art, maroquineries fines, meubles en bois peints. C'est dans. ces ateliers qu'il fera réaliser différents travaux de décoration, les plus importants étant ceux qu'il crée pour sa propre maison, ceux qu'il présentera à l'Exposition des Arts décoratifs de 1925 et enfin ceux qu'il fait exécuter pour l'hôtel Mamounia à Marrakech. Le plafond de la grande salle à manger du célèbre palace est peint de motifs qui font référence à l'art berbère. En 1931, il confiera la réalisation d'un nouvel atelier à l'architecte Sinoir.

En 1921, il expose à Paris quatre-vingt-dix­sept tableaux, dont trente consacrés à l'Atlas. Lyautey achète trois toiles pour la résidence de Rabat. En 1928, Majorelle a passé plusieurs mois dans la vallée d'Oulina à peindre la kasbah d'Amoniter, Il écrivait à sa femme : "je fais trois séances par jour. Je rentre à sept heures, le cerveau en compote. Je patauge, mais j'insiste. Il faut que je tienne le coup pendant quatre mois". Il était alors familier des paysages de l'Atlas et maîtrisait les techniques des rehauts métalliques.

A partir de 1930, Majorelle délaisse momentanément les kasbahs et les paysages du sud pour se consacrer presque exclusivement au thème des négresses nues . Le mythe de l'Afrique noire est alors très en vogue, mais au-delà de l'effet de mode, le peintre semble réellement fasciné par la beauté et la sensualité de ces femmes qu'il fait poser dans la végétation luxuriante de son jardin. La consécration de cette nouvelle série se fera en novembre 1934 à la galerie Charpentier à Paris : 115 tableaux sont représentés dont 95 rendent hommage aux négresses nues. Des rehauts métalliques d'or, d'argent et de bronze subliment l'éclat de ces corps d'ébène qui semblent évoquer la nostalgie du paradis perdu et qui ne manquent pas de susciter les fantasmes des acheteurs occidentaux.

Pendant la deuxième guerre mondiale, il effectue des séjours dans l'Atlas et organise une exposition pour financer les dépenses entraînées par l'entretien des jardins. Si l'exotisme est très présent dès les années 30 dans la vie du peintre, ce n'est qu'après la guerre qu'il se rendra en Afrique noire à la recherche des origines de ses modèles. De 1945 à 1952, il effectue trois séjours en Afrique noire: au Soudan, en Guinée, en Côte d'Ivoire, au Niger et au Sénégal, Ses voyages successifs le mèneront au milieu des foules bigarrées, des marchés grouillants. Des portraits de femmes témoigneront encore de la vie de tout un peuple. Mais, si les sujets restent à peu près-identiques, la palette de l'artiste évolue. Dès le premier voyage la tonalité des tableaux change, les harmonies sont plus violentes, les couleurs plus vives. Victime en 1955 d'un accident de voiture, il est amputé d'un pied. A la suite d'une fracture du fémur, il est rapatrié en France où il décède le 14 décembre 1962. Il est inhumé à Nancy au cimetière de Préville avec ses parents.

Son jardin, laissé à l'abandon pendant plusieurs années, revit grâce à l'intervention de Pierre Bergé et du couturier Yves Saint-Laurent. Abderrazzak Benchaâbane, ethno-botaniste, en a la charge. Il s 'y rend chaque jour pour cultiver 235 espèces de plantes différentes. A quelques mètres de là vit Michel Hamann, l'héritier du peintre. Il s'est installé dans une partie du jardin de son grand-père. Sa maison est pleine de souvenirs de cet homme qu'il appelle "son modèle". A travers ce jardin, c'est un personnage à multiples facettes que l'on découvre, un homme qui a contribué à l'histoire de la ville de Marrakech.

 

O.G.
(d'après des documents
fournis par Internet)

 

1 Voir la biographie de Louis-Hubert Lyautey dans Les Cahiers d'Afrique du Nard, N° 11

 

 

 

Expositions et travaux :

 

* Jacques Majorelle expose pour la première fois en 1908 à Paris à la Société des Artistes Français.

* En 1909, il présente à Paris et à Nancy des œuvres inspirées de ses voyages à Venise et en Espagne. A partir de cette même année, il exposera régulièrement à la Société Lorraine des Amis des Arts.

* En 1918, une première exposition au Maroc est organisée dans le hall de l'hôtel Excelsior à Casablanca. Il y présente ses premiers travaux marocains.

* En 1919, la chambre de commerce de Nancy accroche sur ses cimaises des vues d'Égypte et du Maroc.

* En 1922, une grande exposition, à Paris, à la galerie Georges Petit consacre les travaux de ses premiers périples dans l'Atlas. Quatre-vingt dix­sept huiles et gravures sont présentées à cette occasion.

* A Paris, les ateliers Majorelle de Marrakech participent à l'Exposition Internationale des Arts Décoratifs de 1925. Ils décorent le hall de la section du Maroc de meubles, coussins et tableaux.

* Jacques Majorelle présente à Casablanca en 1929, des œuvres qui seront reproduites dans L'Album des Kasbahs. Cet ouvrage, préfacé par Lyautey et publié en 1930, est illustré de trente planches, rehaussées d'or et d'argent.

* En 1930, exposition à la galerie Renaissance à Paris

* En 1931, Majorelle participe à l'Exposition Coloniale Internationale de Vincennes. Il peint notamment à cette occasion pour le pavillon du journal La Vigie marocaine une grande composition décorative, Les Allamittes.

* Deux ans plus tard, en 1933, il présente à la galerie Derche à Casablanca son travail sur le corps nu. Il montre des femmes noires, flânant dans le jardin ou sommeillant sur des draperies aux couleurs vives. Ces "épidermes noirs bruns qu'embellissent un or pur", ainsi que l'écrit Victor Prouvé dans L'Est Républicain du 27 octobre 1933, seront aussi montrées à Nancy à la galerie Mosser et en 1934 à Paris à la galerie Renaissance.

* En 1937, il propose à Rabat à la galerie d'Art du journal L'Echo du Maroc des œuvres ou l'on retrouve des vues de souks et des nus ainsi que deux grandes compositions, L'Ouach et Le Moussem; commandes officielles pour l'Hôtel de ville de Casablanca.

* A partir de 1939 et jusqu'en 1956, Jacques Majorelle organise tous les ans une exposition à la galerie Derche de Casablanca. En outre, son atelier comporte une salle circulaire d'exposition qui lui permet d'exposer en permanence et de vendre des œuvres aux touristes de passage.

* Vers 1946, encouragé par son ami Winston Churchill, il expose à Londres.

* A Casablanca, en 1948, il expose le résultat de recherches menées en Afrique Noire au cours de deux premiers voyages dans ces régions.

* A Abidjan, en 1952, il montre des paysages peints à l'occasion de nouveaux séjours en Afrique Occidentale Française.

* En 1960, est organisée à Casablanca à la galerie Venise-Cadre la dernière exposition importante du vivant de l'artiste. Des toiles du Maroc, d'Egypte et d'Afrique y sont accrochées.

* Trois ans après la mort de Jacques Majorelle, la galerie Venise-Cadre de Casablanca rend hommage à Majorelle en 1965. Deux ans plus tard, sa ville adoptive, Marrakech accueille à son tour une exposition rétrospective à la Mamounia.

Le souvenir de Jacques Majorelle a été évoqué lors d'une récente émission télévisée sur le Maroc "Des racines et des ailes".

Une rétrospective de ses œuvres initialement exposée au Musée des Beaux-arts de Nancy a été présentée à l'Institut du Monde Arabe en 2000.

 

 

Bibliographie :

 

* Marrakech : le secret des maisons jardins. Michel Lebrun, Editions A.C.R.

* Les Orientalistes : Jacques Majorelle Félix Marcilhac, Editions A.C.R.

* Maroc: les Palais et Jardins royaux ~, Mohamed Métalsi. Editions Malika, 2004.

* Marocan Interiors, collectif. Taschen, 2003.

 

 

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