Amédée

Froger

 

 

Philippeville 1882

Alger 1956

 

« Le dynamique maire de Boufarik était au soir d’une vie toute entière vouée au bien public et à l’idéal d’une Algérie heureuse dans le sein d’une France rénovée et puissante ».1

                Il était 10h15 du matin à Alger, le 28 décembre 1956, quand, à l’angle des rues Michelet et Altairac, Amédée Froger, 74 ans, grand mutilé de la guerre de 1914-1918, s’écroula sous les balles d’un terroriste.  Cette mort rendit encore plus sombre les derniers jours d’une année particulièrement meurtrière.  Son grand patriotisme, l’autorité acquise dans tous les milieux l’avaient désigné comme un adversaire intraitable de la rébellion.

Amédée Froger était né le 23 mai 1882 à Philippeville.  Ses ancêtres de Bretagne s’étaient installés en Algérie en 1836.  Tout jeune licencié en Droit, il fut mobilisé dans les Zouaves.  Il accomplit une guerre douloureuse mais brillante.  Marqué dans sa chair par de terribles blessures reçues sur le front, et décoré sur place de la Croix de Guerre, il s’avéra inapte pour l’infanterie.  Il décida alors de reprendre du service dans la première aviation de combat et se révéla comme un pilote militaire d’une valeur exceptionnelle.  Le 28 décembre 1915, son avion fut abattu entre Soissons et Paris.  Il resta trois mois dans le coma et fut reconnu invalide à 75 %.

                Il s’installa à Boufarik dès la fin des hostilités.  Cette petite ville, la Reine de la Mitidja, était le symbole de l’éclatante réussite des pionniers français qui, d’un marais inculte avaient fait une cité joyeuse et moderne, vivante et laborieuse au milieu d’un immense verger odorant et fécond. Froger fut élu au Conseil général de l’arrondissement en décembre 1919.  Il en deviendra le Président de 1937 à 1944.  Ayant fait son entrée au Conseil municipal en 1922, il succéda trois ans plus tard au maire, le docteur Péduran. Cette même année, il entra aux Délégations financières et au Palais Carnot, se spécialisant dans les problèmes de transports maritimes, très aigus à l’époque.  Ses interventions sages et mesurées, et toujours très bien documentées, firent autorité.

                En 1948, dès la création de l’Assemblé algérienne, Froger fut élu délégué de la 14ème circonscription (Boufarik).  Apprécié par ses collègues des deux assemblées pour son exquise bonté et la sûreté de ses jugements, il fut élu à l’unanimité Président des Maires d’Algérie. Il sera également, durant de longues années, vice-président  de la Fédération des Maires de France.

                Dans sa commune, et bien avant que les lois en fixent les impératifs, Froger réalisa d’innombrables œuvres sociales touchant aussi bien la santé publique que l’habitat ou l’éducation. Pour rendre hommage aux immenses sacrifices des générations passées, il contribua très activement à faire ériger un monument au génie colonisateur de la France.   Par sa rectitude sans faille et son ardeur combative, Froger faisait l’orgueil des Boufarikois. Son grand cœur et ses qualités altruistes firent converger vers lui, au fil des ans, des amitiés sans nombre.  Véritable guide et chef digne de ce nom, il emportait l’estime des ses rares adversaires, séduits par sa simplicité et sa spontanéité.

                Ce fin lettré n’avait pas de plus grande joie que la lecture des classiques et la poésie.  Il était aussi un très brillant causeur et sa  conversation, riche d’anecdotes et de souvenirs littéraires,  marquait ses interlocuteurs.

                Cet homme était viscéralement attaché à sa terre natale.  Le 6 février 1956, agrippé aux grilles du square Laferrière, houspillé par les forces de police, il fut l’un des premiers à crier son amour pour la patrie en hurlant : «Algérie française».                 

                Ses obsèques rassemblèrent en un long cortège une foule impressionnante venue de tout le pays.  Dans une atmosphère extrêmement troublée, des émeutiers firent exploser des bombes dans plusieurs églises de la ville ainsi qu’au cimetière de Saint-Eugène où il fut inhumé.

                Une statue de bronze à la mémoire du Président Froger fut érigée à Boufarik le 1er février 1959 en présence des plus hautes autorités civiles et militaires.

John  Franklin

 

1 Extrait du discours prononcé par le Général Massu le 1er février 1959

 

 

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