Michel

Krieger

 
 

Molhsheim 1825

Oran 1898

 

Michel Krieger fut un de ces pasteurs dévoués qui sut témoigner de sa foi en apportant son soutien matériel et spirituel aux populations de la toute nouvelle Algérie, donnant ainsi au protestantisme un rôle très appréciable dans l'œuvre de la France.

Né le 20 mars 1825 à Molhsheim (Bas-Rhin), d'une famille protestante, Michel Krieger fit de brillantes études. Bachelier es lettres de l'Académie de Strasbourg en 1840, diplômé de la Faculté de théologie protestante de Strasbourg en 1844, il fur certifié apte à la consécration de «ministre évangélique» par la Faculté de Montauban. Le jeune Alsacien, attiré par la présence du pasteur Théodore Monod, le plus glorieux orateur protestant de l'époque, y soutint sa thèse en latin, qu'il maîtrisait aussi parfaitement que le grec, sur la résurrection des morts, conseillant sagement « de ne pas se livrer à de vaines spéculations, mais de s'appuyer sur les textes sacrés ».

Devenu pasteur de l'importante paroisse de Metz depuis 1852, père de trois enfants, Michel Krieger fut choisi par l'empereur Napoléon III pour aller évangéliser « ses légionnaires» à Sidi-Bel-Abbès. Lors de sa première visite en Algérie en 1860, l'empereur s'était en effet ému de leur abandon spirituel. Lorsqu'on questionnait le nouveau ministre du culte, il répondait avec son humour habituel: « Je ne parle ni l'arabe, ni l'espagnol, mais c'est parce que je parle allemand que l'empereur des français m'a demandé de venir en Algérie. » Le 1er Régiment Etranger formé en 1831, à la demande de Louis-Philippe, et qui participa à la conquête de l'Algérie jusqu'en 1857, était en effet, en majorité germanophone.

En 1860, cet érudit se trouva à la tête d'une paroisse en gestation. Si l'Algérois comptait dès 1844 près d'un millier de protestants, l'Oranie n'en dénombrait que deux cents.

Michel Krieger était instruit de l'exemple donné par le frère de son maître en théologie, le pasteur Adolphe Monod. Celui-ci avait en effet aidé le pasteur Timothée Dürr à créer des orphelinats pour les filles et les garçons à Oran, ainsi que des fermes pour les accueillir dans le futur.

Abandonnant ses sermons nourris de citations bibliques et littéraires il allait chaque mois accomplir sa mission d'aumônier à Sidi-Bel-Abbès, dans une diligence brinquebalante et par des chemins de fortune. Entre le tombeau du marabout éponyme, le village nègre et les rues européennes tirées au cordeau, le centre de la ville était le quartier Vienot, du nom d'un héros de Sébastopol. Les légionnaires s'évadaient de la discipline de fer dans les bouges à filles et à soldats, les pâtisseries dont les Allemands étaient friands, et surtout les cafés tenus par des Espagnols où le vin se payait au litre ou à ... l'heure.

Les rixes étaient fréquentes entre ces hommes de toutes origines, mais surtout Allemands. Le pasteur s'efforça de pacifier ces fortes têtes aux humeurs explosives. Il reconnaissait « qu'il n'avait pas affaire à des Eliacins », mais grâce à la complicité de la langue et sa patience, il sut établir des rapports de confiance et les tirer de leur isolement. Au point que beaucoup de ceux qu'ils avaient soustraits aux vapeurs de l'alcool, revenus à la vie civile, l'appelaient, avec un fort accent teuton, leur Bon Pasteur.

Après 1870, la paroisse d'Oran s'accrut dramatiquement du flot des Alsaciens­Lorrains fuyant leurs provinces annexées. Il les soutint et les réconforta ... Toujours fidèle au souvenir commun, il avait appelé les deux chevaux de son écurie Revanche et Alsace-Lorraine.

Le pasteur mourut le 11 mars 1898 et fut enterré, ainsi que son épouse Louise Klein, au cimetière français de Tamazouet à Oran.

Annie Krieger-Krynicki

 

 

BIBLIOGRAPHIE

 

Traduction de la thèse en latin de Michel Krieger sur La résurrection des morts par Georges Krieger, son petit-fils, sous-préfet honoraire, ainsi que ses notes.

Pierre Goinard, Algérie l'œuvre française (pages 292 à 296) : le protestantisme. Éditions Gandini 2001.

 

 

retour à la page des biographies