Marc

Mingasson

 
 

Genouillat 1864

Maison-en-Champagne 1915

 

 « Il est un devoir auquel personne n'a le droit de se soustraire, c'est la fidélité aux morts dont le sacrifice donne un sens à l'idée de Patrie, puisque, plus encore que les vivants, ils sont les artisans de la com-munauté nationale» (allocution prononcée par le capitaine Cairon à la mémoire du colonel Mingasson). Jusqu'à son sacrifice ultime, Marc Mingasson avait incarné l'image parfaite d'un grand serviteur de la Patrie.

Né à Genouillat (Creuse) le ler janvier 1864, Marc Mingasson, l'écolier qui fait du maniement d'armes avec un fusil en bois, sous la houlette de son instituteur, se plaît à dire: « quand je serai grand, je serai colonel de Zouaves». Cette troupe d'élite n'était pas sans influencer les vocations militaires naissantes. Ce vœu, un destin attentif se réservait de le réaliser jusqu'en ses plus extrêmes conséquences.

Marc fait ses études au lycée de Guéret. Âgé de dix-huit ans, après une altercation avec son père, il part à pied à Guéret le 20 mars 1882 pour coiffer la chéchia du 4e Zouaves comme engagé volontaire.

Désireuse d'étendre son protectorat sur la Tunisie, la France envoie de 1882 à 1887 un corps expéditionnaire dont fait partie le 4e Zouaves. Le 8 avril 1887 le sergent Mingasson est promu chevalier du Nicham Iftikhar. Il signe un deuxième engagement de cinq ans le 5 mars 1887. Admis à l'école d'infanterie de Saint-Maixent en 1888 il en sort 80ème sur 431. Il est désormais sous-lieutenant, affecté au 1er régiment de Zouaves à Laghouat. Nommé lieutenant en août 1891, il est détaché comme substitut du commissaire du gouvernement près du conseil de guerre de la division d'Alger en 1896. Il reçoit la Croix de chevalier de la Légion d'honneur cette année-là. C'est à Alger qu'il épouse Henriette Olivier, une des filles du trésorier-payeur général du Crédit foncier d'Algérie. Ils auront un fils, futur officier, et une fille.

Nommé au grade de capitaine en 1899, il est muté au 143ème régiment d'Infanterie à Aurillac, mais l'appel de la terre africaine est si fort qu'il y demande sa mutation pour convenance personnelle. Il retrouve alors son cher 1er Zouaves en 1900.

La France a étendu son protectorat au Maroc. Elle envoie une fois encore un corps expéditionnaire. Le chef de bataillon Mingasson se retrouve à Marrakech. C'est .sous ses remparts qu'il est décoré de la Croix d'officier de la Légion d'honneur. Durant l'hiver 1913-1914 des épidémies se déclarent dans la population indigène. Marc Mingasson va tout mettre en œuvre pour aider à enrayer ce fléau.

La guerre .est déclarée. Embarqué à Casablanca, Mingasson est à la tête du 2ème bataillon du 1er Zouaves qui débarque à Sète, puis va rejoindre Bordeaux. Conjointement avec le 1er et 3ème bataillons du 4ème Zouaves, sera constitué le 9ème régiment de marche des Zouaves de la 3ème brigade marocaine sous les ordres du lieutenant-colonel Niessel.

Et, c'est le baptême du feu, le 16 septembre 1914 à Carlepont dans l'Oise, après une marche exténuante de 35 km, sac au dos, en soutien de la 37ème division nord-africaine menacée d'enveloppement.

Dans ce combat, Marc Mingasson va laisser paraître ses qualités humaines telles que les a décrites un de ses adjoints: «Je veux le décrire tel que je l'ai connu, Alors que l'esprit offensif et de confiance avait disparu, à tous il communiquait son entrain, sa confiance et sa foi. L'esprit offensif renaît. On avance presque sans perte car le colonel ménageait le sang de ses hommes. Son entrain et son endurance nous étonnaient tous. Il vivait dans une petite grotte ouverte à tom les vents donnant ainsi un exemple de simplicité aux chefs qui emploient tous leurs hommes et tout leur matériel pour construire pour eux seuls des abris confortables. Tous les matins il faisait sa tournée, il suivait tout, savait tout, avait pour chacun un mot aimable, Tous l'adoraient ... »

Un vitrail de l'église du petit village de Carlefort fixe, avec une émouvante piété, le souvenir de ce combat qui coûta au bataillon Mingasson 250 hommes dont une centaine de tués. Dans cette région, qui vit, par la suite, la stabilisation boueuse et sanglante du front, entre Tracy-le-Val et Quennevière, la population montre encore la « grotte Mingasson » où se trouvait le commandement du chef du 2ème bataillon.

C'est en tant que lieutenant-colonel qu'il devait au printemps de 1915 assumer l'épuisante responsabilité du commandement du 9ème Zouaves, dans la meurtrière fournaise de l'Yser où le régiment gagnait la Croix de guerre avec la première des neuf citations à l'ordre de l'armée qui font de son drapeau l'un des 24 emblèmes décorés de la Légion d'honneur. Un document daté du 23 mai 1915 précise que, sous les ordres du lieutenant-colonel Mingasson, le 9ème Zouaves « n'a cessé de se distinguer, faisant preuve d' une persévérance et d'un entrain héroïques, enlevant à l'ennemi, par une lutte pied à pied de seize jours, tous les points d'appui fortifiés qu'il tenait à l'ouest du canal de l'Yser, le rejetant définitivement sur la rive orientale, lui infligeant d'énormes pertes et faisant de nombreux prisonniers ».

Comment s'étonner, dès lors, de voir le colonel Mingasson recevoir des mains du roi Albert 1er de Belgique, la Croix d' officier de Léopold, le jour même de la remise de son drapeau, par le Président de la République Raymond Poincaré, le 24 août 1915, près de Saint Nicolas du Port en Lorraine ?

La deuxième grande offensive se prépare en Champagne. Le 9ème Zouaves va se couvrir de gloire. C'est à l'attaque héroïque de Maison-en-Champagne, cote 185, que Marc Mingasson tombe, frappé par un obus le 27 septembre 1915, justifiant les termes de son ultime citation: « Chef de Corps de premier ordre, doué des plus belles qualités militaires, tué glorieusement à la tête de son régiment, au moment où il l'entraînait à l'assaut des retranchements ennemis. »

L'écolier avait accompli son rêve: il était colonel die Zouaves. Le Zouave avait donné sa vie à sa patrie. Il repose au cimetière national de Minaucourt auprès de 21000 camarades de toutes armes,

Marc avait un sens aigu du commandement. À son fils Jean, l'élève aspirant qui n'a pas encore dix-huit ans, il écrit: « Tu vas avoir l'honneur de commander des hommes. C'est très difficile. Soit loyal, soit juste, ne leur demande jamais de faire ce que tu ne pourrais pas ou ne voudrais pas faire toi-même. »

Alger avait donné son nom au stade de la caserne d'Orléans. Une rue d'El-Biar portait aussi son nom.

 

OG
D'après des documents fournis par la famille

 

BIBLIOGRAPHIE

 

La légende des Zouaves. Éditions SOPAIC. Juin 2003.

 

retour à la page des biographies