Germaine Philomène

Fabre

 
 

Leseure-Lapanousse 1867

Biskra 1937

 

Par sa vie exemplaire. entièrement consacrée au service des populations indigènes. Sœur Marie­Rosalie peut être comptée parmi ces femmes « au cœur de feu », qui ont témoigné de leur foi avec le plus grand dévouement auprès des plus pauvres.

Germaine Philomène Fabre est née le 25 mai 1867 à Leseure-Lapanousse (Aveyron). Ses parents, propriétaires terriens, exploitaient eux-mêmes leur ferme que leurs enfants devaient reprendre plus tard. Une sœur aînée de Germaine aurait voulu être religieuse, mais s'était heurtée à l'opposition de ses parents. La jeune fille était morte sans avoir réalisé son désir. «Tu seras religieuse à ma place », avait-elle dit à sa cadette. De fait, Germaine eut très tôt la vocation. Dans ce milieu rural, profondément chrétien, elle avait puisé une foi robuste, un caractère ferme et un bon sens à toute épreuve. Dès l'âge de 14 ans et demi, partie en Algérie, elle frappait à la porte des Sœurs Blanches et le 25 mars 1882, elle revêtait à Saint-Charles (département d'Alger) l'habit blanc des novices et reçut le nom de Sœur Marie-Rosalie.

Le cardinal Lavigerie(1), qui visitait souvent le noviciat, avait une prédilection pour "sa benjamine" qui lui garda toute sa vie une vénération filiale.

Après sa profession le 8 octobre 1883, Sœur Rosalie prépara le brevet d'institutrice qu'elle obtint le 6 octobre 1885.

Peu après, elle partit à La Marsa (Tunisie) où elle fut mise à l'épreuve par des tracasseries administratives de toutes sortes. Le directeur de l'enseignement, n'osant s'opposer au cardinal Lavigerie en personne, s'attaquait à elle. Patiemment, elle attendait que la paix revienne. D'ailleurs, le travail abondait, ne lui laissant pas le loisir de s'attarder à des vétilles! C'est à La Marsa qu'elle fit ses débuts d'infirmière, en soignant, sous le contrôle des médecins, les sœurs de la communauté.

En 1891, Sœur Rosalie partit pour Djerba où elle assuma les fonctions de directrice d'école et de supérieure. Mais de graves ennuis de santé la ramenèrent en Algérie, puis la conduisirent en Hollande où elle subit une opération.

En décembre 1904, elle arrivait à l'hô­.pital Lavigerie à Biskra. C'était l'époque où l'on évaluait l'importance d'une oasis, non par le nombre de ses habitants, mais par celui de ses palmiers; ainsi, Biskra était une oasis de 20000 palmiers, sans autre précision. Mais les sœurs n'étaient pas venues pour les palmiers, même si elles en appréciaient les fruits!

L'hôpital, ouvert en 1695, voyait ses cinquante lits presque toujours occupés, et en période d'épidémie, il fallait ajouter des lits supplémentaires. Il y avait aussi 120 à 130 malades au dispensaire chaque matin, et certains avaient besoin d'être suivis, soit dans la ville elle-même, soit sous la tente des nomades environnants. Sœur Rosalie était souvent de ces visiteuses bénévoles. Sa connaissance de la langue et des coutumes locales, unies à sa compréhension et à son inlassable bonté, lui ouvraient toutes les portes. Elle aimait ces femmes sahariennes, si habiles à dresser et démonter la tente, à seller et bâter chameaux et mulets, à filer la laine et tisser les felidj (étoffe des tentes). Elle admirait leur courage, leur endurance sans faille. Elle savait que la vie était dure pour elles. Lorsque lors d'une première visite, elle demandait à une femme: "Combien as-tu d'enfants?", elle ne manquait pas, après la réponse, de demander : "Combien en as-tu de morts?", sachant que leur nombre dépassait souvent celui des vivants.

Ses visites comportaient toujours des conseils pratiques. Elle s'asseyait souvent au milieu des femmes pour lier conversation, s'instruire à leur contact et les aider à améliorer l'alimentation des jeunes enfants, des malades qu'elle venait soigner.

À l'époque, les Sahariennes soignaient facilement les plaies par des cautérisations faites avec un petit couteau à lame large et courbe, rougi au feu. On arrêtait une hémorragie avec de la terre, on soignait les plaies avec un mélange de beurre fondu, de henné, de résine, le tout recouvert d'une pelure d'oignon. Mais les grands remèdes étaient les amulettes. Quelques versets du Coran écrits sur un papier étaient mâchonnés, puis avalés par le malade. Si celui-ci était un vrai croyant, il serait guéri ... Sœur Rosalie conseillait d 'y ajouter le repos, sachant qu'un sommeil réparateur est le meilleur des remèdes.

Il y avait aussi les amulettes permanentes, suspendues au cou de l'enfant nomade. On y mettait une dent de chien hargneux pour qu'il sache se défendre avec acharnement, un écrou pour qu'il devienne fort comme le fer, un poil de chameau pour qu'il en acquière l'endurance, une tête de serpent pour qu'il en ait la prudence et une tête de caméléon pour qu'il sache modifier sa façon de faire selon les circonstances.

Un jour, à l'oasis, une de ses amies l'emmena dans une pièce intérieure de son habitation, écarta une tenture et ouvrir un coffre. « Vois, dit-elle, ce drap était celui du mariage de ma fille. Elle était vierge ... grand honneur pour moi qui ai su la garder, et pourtant, ajoutait-elle fièrement, elle allait à l'école, et rencontrait des garçons! » Il y avait chez les Sœurs une école ménagère de filles, mais il y avait en ville une école primaire, mixte, fréquentée par les enfants des fonctionnaires locaux.

À l'hôpital, on voyait souvent Sœur Rosalie assise auprès des malades, dans les salles, leur parlant de Dieu, de la confiance en Lui, et de la prière qui obtient tout.

C'est à Biskra que Sœur Rosalie devait terminer une existence si bien remplie, après avoir exercé d'autres charges, à Laghouat et à Alger. Une pneumonie double l'emporta vers le Seigneur le 18 mars 1937 à près de 70 ans. Elle repose maintenant dans la palmeraie, au milieu des autres sœurs décédées à Biskra.

 

Sœur Marie André du Sacré-Cœur

 

1 Voir la biographie du Cardinal Lavigerie dans Les Cahiers d'Afrique du Nord n° 6

 

 

Bibliographie

 

Revue Hommes et Destins Tome VII.

 

 

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