Etienne

Bouchaud

 
 

Nantes 1898

Paris 1989

 

Peintre et graveur de talent, Étienne Bouchaud a consacré une partie de sa vie à évoquer des scènes de la vie de l'Algérie et du Maroc. Son œuvre est à la fois multiple par toutes les techniques qu'elle emprunte, et unique par cette lumière silencieuse qui la baigne. Une exposition organisée en juin 2006 à la galerie Philippe Heim, 38, rue de Penthièvre à Paris, a permis de révéler cette œuvre dans sa diversité.

Etienne Bouchaud est né à Nantes le 15 février 1898. Frère et petit-fils de peintres, il est issu de cette bourgeoisie ouverte tant sue le siècle des Lumières que sur le xxe siècle contemporain. Sa jeunesse est heureuse. Les fenêtres de l'appartement qui abrite son enfance ouvrent sur le port et sa forêt de mâtures. Première vision d'ailleurs ... Il est bachelier ès Lettres en 1915.

En 1916, voici notre jeune peintre à Paris, avide d'apprendre et de se confronter au monde palpitant des arts, Il entre d'abord à l'Académie Julian dirigée par Jean-Paul Laurens, puis à l'Académie Ranson chez Maurice Denis. Le maître est dans sa période religieuse. Étienne s'enthousiasme, part pour l'Italie et s'émerveille devant les grands fresquistes du Quattrocento. Riche de ces deux enseignements, il produit un certain nombre d' œuvres à caractère religieux.

 Volontaire pour le Maroc, il part pour un séjour de dix-huit mois dans l'armée. Il rencontre Lyautey qui, sentant un artiste dans le jeune militaire fraîchement débarqué, lui accorde sa confiance. Le maréchal, grand ordonnateur en 1931 de l'exposition coloniale de Vincennes, se souviendra du peintre découvert en 1918 et lui confiera la réalisation de deux dioramas pour les palais du Maroc et de l'Algérie.

 La réalisation de travaux décoratifs pour l'exposition coloniale de Marseille en 1922 lui offre l'occasion d'un long séjour en cette ville. Le vieux port, la Canebière et leur animation si particulière le fascinent. De la jetée, il voit les bateaux partir pour ces contrées qui l'attirent. Il y retournera régulièrement par la suite.

 Il expose en 1924 au Salon des Indépendants. En 1925, trois ans après Jean, son aîné de sept ans, il obtient le prix, devenu recherché, de la villa Abd-el-Tif. Il en devient l'hôte heureux et sa peinture s'épanouit sous le ciel lumineux d'Alger. Le Maroc l'avait connu militaire, l'Algérie le consacre peintre.

 Avec intelligence et respect, il ne cherche pas à suivre les chemins empruntés par son frère, mais, déterminé, il trace sa voie personnelle, faite de travail et de rencontres. Les rencontres sont en effet l'une des caractéristiques essentielles de sa vie. Il fait la connaissance de Marquet, Brouty, Pascin et Launois, quatre artistes amoureux de l'Algérie. Avec le dernier, il sillonne la casbah n'hésitant pas à franchir les portes interdites. Launois est une forte personnalité, tout entier pris par l'Algérie.

 

 

La Pêcherie, gravure, Alger.

 

Au fil des années, Bouchaud devient l'un des plus fins connaisseurs de cette Alger, blanche et silencieuse sous la chaleur. La casbah, les môles, la jetée, le port, n'ont plus de secret pour ses yeux avides de tout posséder. Il ne se laisse jamais aller à la facilité. Il ne se contente jamais d'une évocation un peu facile de l'Orient dont quelques peintres de passage peuvent se satisfaire, pour briller au retour dans les salons parisiens. Il veut être juste, et il l'est, avec sa retenue, ses silences, sa palette assourdie malgré le bleu dur des ciels d'Afrique. Ses tableaux résonnent d'une musique intérieure, intimiste et parfois mélancolique. Il cherche à percer l'âme arabe dans sa fierté et sa résignation.

Chargé de mission par le protectorat du Maroc en 1929, il fait un voyage à Marrakech et Fès. Il séjournera à Alger en 1950 chez le compositeur Léo Barbès. Il obtient en 1955 une bourse du Gouvernement Général de l'Algérie.

 

Le Môle, gravure,Alger

 

Dans les années cinquante, Bouchaud n'est qu'à la moitié de son parcours d'artiste. Il explore d'autres techniques, la dernière découverte étant celle de la gravure. Après la couleur des ciels méditerranéens, c'est le noir et blanc de la pointe sèche qu'il pratique. Peu à peu, la gravure empiète sur son œuvre peinte. Il y consacre toute son énergie et sa soif de créer, avec toujours cette ténacité et ce sérieux qui le caractérisent.

1962, un monde s'achève. Les bateaux ne partent plus, Pour lui aussi l'Algérie est fermée. Il n'y retournera plus. Son chant du cygne est un tableau au souvenir macabre et bien lourd. Il l'intitule « Honneur aux harkis ».

Étienne Bouchaud découvre alors la Catalogne qui l'accueille comme l'un des siens. Il peint la nature fière, la lumière généreuse. Conquis par l'atmosphère du Roussillon, il reviendra chaque printemps séjourner à Perpignan et sur la Costa Brava, et sillonner les chemins balayés par la tramontane.

 

O.G.
D'après Anne Heim

 

 

PARMI SES ŒUVRES

 

PEINTURES

 

 Mauresques attendant le passage des aïssaouas : crayon et gouache, Rabat 1919

 La Médersa à Salé: huile sur toile, Maroc 1920

 Sur le môle: crayon, aquarelle er gouache, Alger 1925

 Femmes dans leur intérieur: crayon et rehauts de gouache, Alger 1928

Flânerie: dessin au crayon, Alger 1928

 La Pose en rose et vert: aquarelle et gouache, Alger 1933

 Le nain du cirque: aquarelle et gouache, Alger 1933

 Femme à sa fenêtre: aquarelle et gouache, Alger 1933

Marins sur le port: huile sur toile, Alger 1933

 Les Petits Gitans: dessin et aquarelle, Alger 1933

Le Chapeau de paille: aquarelle, Alger 1933

Joueurs de dominos: huile sur toile, Alger 1947

Les Musiciens sur le môle: aquarelle, Alger 1947

Rue Sadi Carnot: gouache, Alger 1947

Les Arcades: huile sur toile, Alger 1947

La Crique: pastel, Algérie 1955

L'Oasis d'Ouargla: pastel, Algérie 1955

Les Vendanges: huile sur papier, Algérie 1957 (projet de décoration pour le paquebot Penthièvre II)

 Hommage aux Harkis: huile sur toile, 1962, musée des années trente, Boulogne-Billancourt.

 

 

GRAVURES

 

La Pêcherie: Alger

Le Môle: Alger

 

 

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