Louis Franchet

d'Esperey

 
 

Mostaganem, 1856

St Amancet (Tarn), 1942

 

Magnifique soldat aux quinze campagnes de guerre, grand capitaine aux conceptions napoléoniennes depuis la Marne jusqu'aux Balkans, chrétien pétri d'humanisme, Franchet d'Esperey a mis toute sa riche personnalité - avec peut-être trop de modestie - au service du pays dont il demeure le "maréchal sans peur et sans reproche" .

Louis, Félix, Marie, François Franchet d'Esperey est né le 25 mai 1856 à Mostaganem, chef-lieu du département d'Oran. Son père, capitaine aux Chasseurs d'Afrique, y tenait garnison après quatorze années de séjour en Algérie. Peu après la naissance de son fils, il est muté en métropole et le jeune Franchet d'Esperey passe son adolescence à Versailles, au sein de sa famille, avec son frère cadet et une petite sœur. En 1870 mère et enfants, fuyant l'invasion prussienne, se réfugient en Normandie. De retour a Versailles le futur maréchal, élève au Lycée, obtient son baccalauréat et prépare Saint-Cyr qu'il intègre en 1874.

Sous-lieutenant en 1876 il choisit le 1er régiment de Tirailleurs algériens à Blida. Il y servira successivement à Blida, Aumale, Ténès, Cherchell, Tizi-Ouzou et même Alger. Il participe, avec son régiment, à l'expédition de Tunisie, reçoit le baptême du feu, puis entre à l'Ecole de Guerre, à Paris, d'ou il ressortira "breveté".

En 1885 il conduit un important renfort de Tirailleurs au Tonkin et prend part à de durs combats pendant deux ans ; il est promu capitaine et reçoit la croix de chevalier de la Légion d'Honneur.

Affecté, à son retour d'Indochine, à la Place de Paris, il rejoint, en 1890, le 4e régiment de Tirailleurs, en formation, en Tunisie. L'année suivante, il est appelé à Paris au Ministère de la Guerre et en 1892 il épouse une demoiselle Dumaine de la Josserie.

Le jeune ménage part aussitôt en Tunisie. De cette union naîtront deux enfants: Louis en 1897 et Jacqueline, en 1905.

Nommé chef de bataillon à 37 ans, Franchet d'Esperey quitte l'Afrique du Nord pour Toul et le 153e régiment d'Infanterie et prend ensuite le commandement du 18ème bataillon de Chasseurs à Stenay. Lieutenant-colonel en 1899 il exerce, peu de temps, les fonctions de commandant-adjoint de l'Ecole de Saint-Cyr avant de rejoindre en 1900, le corps expéditionnaire international envoyé à Pékin contre les Boxers.

A l'automne 1901, il rejoint le 130e régiment d'Infanterie à Reims puis le 60e à Besançon. En 1905, lors de l'application des lois sur la séparation de l'Eglise et de l'Etat il lui déplaît de continuer à servir en métropole ; il est nommé conseiller militaire de la délégation française siégeant à la conférence internationale d'Algésiras traitant des affaires marocaines. Il effectue, pendant ses congés d'été, de nombreux voyages en Allemagne, en Autriche, en Scandinavie et aux Balkans avant d'être promu général de brigade en 1908.

Général de division quatre ans plus tard, il est placé à la tête de la 28e division alpine à Chambéry. Mais Lyautey le réclame au Maroc.

Second du Résident Général, il monte les opérations aboutissant à la reprise de Marrakech, la pacification du Tadla et l'occupation d'Agadir.

1913, Joffre le nomme commandant du 1er Corps d'Armée à Lille. Dès le mois d'août 1914 il prend position sur la Meuse, au sein de la Vème Armée. Son énergie, son sens de la manœuvre, sa maîtrise de la tactique lui permettent de tenir derrière la Meuse puis, pendant la retraite, de gagner la bataille de Guise le 30 août 1914, ce qui le désigne à l'attention de Joffre, qui lui confie la Vème Armée.

Il sera, avec Galliéni, à l'origine de la manœuvre qui permet la bataille de la Marne. Appuyant les Anglais sur sa gauche, soutenant Foch sur sa droite, il devient le principal artisan de la victoire de la Marne. Enfin il libère Reims.

Mais le front se stabilise et les mornes tueries de la guerre de tranchées incitent Franchey d'Esperey à s'intéresser à l'Aviation, cette arme nouvelle et à préconiser l'ouverture d'un front en Orient.

Nommé, en 1916, Commandant du Groupe des Armées de l'Est il a la douleur de perdre, à la fin de l'année, son fils puis son frère, tous deux tués à Verdun.

Mis à la tête, en 1917, du Groupe des Armées du Nord, il monte, après l'échec de Nivelle, l'offensive de la Malmaison qui atteint tous ses objectifs avec le minimum de pertes.

Lors des ruées allemandes du printemps 1918 et du recul du Chemin des Dames, il est sacrifié a la vindicte parlementaire et perd son commandement; mais Clémenceau le nomme général en chef des armées alliées d'Orient.

De Salonique aux confins albanais 500.000 hommes environ, français, britanniques, serbes, grecs, italiens, affrontent autant de germanos-bulgares. Franchet d'Esperey prépare, au cours de l'été 1918, une bataille qu'il souhaite décisive. Malgré certaines réticences des gouvernements anglais et français il est autorisé à attaquer. Il lance, le 15 décembre 1918, deux corps d'armées franco-serbes contre le massif du Dropolje ; le front est crevé. Puis entame une poursuite exemplaire jusqu'à Uskub (aujourd'hui Skoplje). Le 30 septembre 1918 la Bulgarie capitule: c'est le premier armistice de la Grande Guerre.

Sans désemparer, Franchet d'Esperey libère la Serbie, entre en vainqueur à Belgrade, franchit le Danube, relance la Roumanie dans la guerre ; dans le même temps il menace la Turquie qui abandonne la lutte le 30 Octobre.

Le général en chef de l'Armée d'Orient peut présenter un bilan élogieux : une avance de 600 kilomètres, la Serbie libérée, la Bulgarie et la Turquie vaincues, 90.000 prisonniers et 800 canons capturés. Seule la cessation des hostilités du Il novembre 1918 le prive d'entrer à Budapest et à Vienne.

Il doit cependant attendre 1921 pour être élevé à la dignité de Maréchal de France. Nommé en 1923 Inspecteur Général des troupes d'Afrique du Nord, il va pouvoir s'attacher à réaliser ses grands desseins. Tout d'abord faire du Maroc, de l'Algérie et de la Tunisie un bloc homogène bien relié à l'Afrique Noire par l'avion et l'automobile, le tout devant constituer le bastion sud de la métropole. Lors de la seconde guerre mondiale, l'évolution des événements en 1942-1943, viendra confirmer la pertinence de son projet. Par ailleurs il fonde Les Amitiés Africaines et crée les Dar-el-Askri (Maisons des soldats) pour aider les anciens militaires autochtones ainsi que pour diffuser et asseoir l'influence et le rayonnement de la. France. Membre fondateur de l'Académie des Sciences Coloniales, Président de la Société Nationale de Géographie, il se dépensera au service de l'Empire Colonial Français de l'entre-deux-guerres.

En 1933, alors qu'il effectuait, en automobile, une reconnaissance, dans le Sud-tunisien, en vue de la construction d'une grande rocade routière depuis Gafsa jusqu'à Agadir, il est victime d'un grave accident. Sérieusement blessé et handicapé, il se déplacera désormais avec difficulté. En 1934 il est élu à l'Académie Française au fauteuil de Lyautey.

En 1940, après un douloureux exode, il se retire en zone non occupée à Albi et décède au manoir de Saint Amancet, le 8 juillet 1942, a l'âge de quatre-vingt-six ans. Inhumé provisoirement dans la crypte de la cathédrale d'Albi sa dépouille sera transférée solennellement, en 1947, aux Invalides.

Pierre Gosa

 

 

Bibliographie :

 

Pierre Gosa : Un maréchal méconnu, Franchet d'Espérey, vainqueur des Balkans (1918 J. Nouvelles éditions latines (1999).

En annexe de l'ouvrage cité: une bibliographie de livres ou publications ayant trait au maréchal Franchet d'Espérey.

 

 

Parmi ses œuvres :

 

* Biographie du Maréchal Bugeaud. Ed. Hachette 1938.

* L'Armée Française, de la Révolution à 1919. (Collection Hannoteau sur la Nation française).

* Nombreuses préfaces, notamment celle du fascicule sur l'Armée d'Afrique, incluse dans les cahiers du Centenaire de l'Algérie en 1930.

 

 

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