Lucienne

Favre

 
 

Paris 1894-1958


Lucienne Favre et Laure Senti, Alger, 1935.
 

Alger bonheur, Alger de jeunesse, deux femmes aux destins bien différents qu'une ville et une amitié d'esprit avaient réunies.

Lucienne Favre est née à Paris le 4 janvier 1894. Elle n'a pas connu son père, décédé plusieurs mois avant sa naissance. Dans des circonstances qui nous sont inconnues, elle arrive à Philippeville à l'âge de neuf ans et séjourne dans la région. A dix-huit ans, elle épouse à Paris Louis Turlin, né à Bône en 1891. Le jeune couple est domicilié à Paris et une fille, Jacqueline, naît le 16 octobre 1912.

Louis Turlin, ayant achevé ses études de droit et son sursis d'incorporation étant épuisé, est appelé sous les drapeaux. Nommé sous-lieutenant, il est versé dans les Tirailleurs. Il meurt au combat le 5 novembre 1914 à Marceuil (Pas-de­Calais). Lucienne, dans une situation financière difficile, s'installe alors avec sa mère et sa fille à Alger, au 17bis rue Richelieu. Jacqueline est externe à l'institution Fénelon. En 1923, Lucienne se remarie avec maître Gaillard (né à Bougie en 1880), avocat à la cour d'appel d'Alger. C'est une période faste pour Lucienne qui entame une carrière littéraire. Par sa beauté, son élégance peu courante, elle est très remarquée dans les milieux algérois. On reçoit beaucoup chez maître Gaillard, dans le quartier du Palais de justice. 

Les familiers sont le couple Léveilley, Marie­Josèphe et Charles Plâtrier, Edmond Brua et son épouse. Le jeune Camus er Max-Pol Fouchet fréquentent aussi ce cercle. Lucienne, souvent accompagnée par Le Corbusier, se rend à la Casbah où la vie des femmes la fascine. Ses premiers romans en SOnt inspirés.

En 1934, débute sa production théâtrale avec Isabelle d'Afrique et surtout Prosper. Son projet de pièce (il s'agit de son roman Tout l'inconnu de la Casbah d'Alger) est envoyé à Gaston Baty, directeur du Théâtre de la Gaîté-Montparnasse. Celui-ci monte Prosper dont la première est jouée le 24 novembre de la même année. La pièce se déroule en trois actes et comporte treize tableaux. Les décors représentent la Casbah, une rue, une fontaine, un escalier, des terrasses et la chambre de Malvina, le personnage central. La musique est d'Ida Bouchène. Cette première est l'occasion d'une grande publicité pour l'Algérie avec l'aide de l'Office algérien de l'action économique (OFALAC) : peintures, gravures, livres sur l'Algérie. Le foyer du théâtre accueille une exposition de tableaux de Launois, peintre qui choisit ses sujets dans le personnel des maisons closes de la Casbah. Le peintre Bouchaud expose deux toiles. Des planches, extraites de l'Iconographie de l'Algérie d'Esquer ainsi que des photographies de l'OFALAC figurent également. En outre, la galerie Dinet, rue Royale, consacre quelques semaines aux peintres contemporains de l'Algérie. Avec la production de Lucienne Favre, des livres sur l'Algérie sont exposés : A. Gide, P. Loti, 1. Bertrand, G. Audisio, G. Marçais, Alazard, Brousseaud. Le programme offre, avec les portraits des principaux acteurs et de l'auteur, des placards publicitaires sur l'Algérie. Mais la critique fait surtout honneur au

talent incontestable de Gaston Baty. L'auteur n'est certes pas oubliée, mais, étant encore inconnue, elle figure en seconde zone. Le nom de Prosper, titre de la pièce, sera repris par Maurice Chevalier pour une chanson qui deviendra célèbre. La centième représentation a lieu le 20 février 1935.

Le 23 décembre 1936, le suicide de maître Gaillard laisse Lucienne effondrée. Sa production littéraire marque un arrêt. Elle se remettra à écrire en 1939.

Elle se marie une troisième fois à Paris le 18 juillet 1939 avec René Dard, anciennement maître imprimeur aux établissements Baconnier à Alger. Le couple réside à Paris, rue de l'Université. Il semble qu'il ait vécu les années de guerre en France. Mais nous n'avons pas de précisions sur cette période, ni sur celle qui a précédé le décès de Lucienne Favre à Paris, le 21 mars 1958.

O.G.

Documentation : Yves Pleven

 

PARMI SES ŒUVRES

 

- Dimitri et la mort, Ferenczi, 1925.

- Bab-el-Oued, Grès, Paris, 1926.

- L'Homme derrière le mur, Grès, Paris, 1926.

- La Noce, Anzeme, 1927, Grasset, 1929.

- Orientale 1930, 1931.

- Tout l'inconnu de la casbah d'Alger, Baconnier, Alger, 1933. - Prosper, 1935.

- Dans la casbah, Alger, 1933, Grasset, 1937.

- Le Bain juif, Alger, 1937, Grasset, 1939.

- Les Aventures de la belle Doudja, Gallimard, 1946.

- Mourad, Denoël, 1942-1943.

- Mourad Il, Denoël, 1947-1948.

 

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