César

Comolli

 
 

Bougie 1895

Toulon 1965

L'Algérie a connu une grande diversité dans les hommes qui se sont illustrés à son service. Personnage atypique, homme de grande valeur, César Comolli a connu un destin tourmenté.
 

Cette bibliographie a pu être établie grâceaux renseignements de son fils. Yvan Comolli, président de la Chambre honoraire du Tribunal de commerce de Paris, actuellement vice-président trésorier de la Chambre de commerce et d'industrie de Paris.

 

Né à Bougie en 1895, il était le deuxième enfant de la famille. Son père Louis avait construit la place de Gueydon et était mort des suites d'une chute lors de la réfection des façades de la maison Martel.

César Comolli était donc enfant de Bougie et restait très lié à sa ville natale. Après avoir espéré longtemps pouvoir finir ses jours à côté de celle qui fut sa compagne exemplaire pendant vingt-trois ans, il n'a pu voir hélas se terminer son rêve sur sa terre natale. Les suites de l'indépendance de l'Algérie ont été trop dures pour lui et c'est à Toulon qu'il s'est éteint en 1965, écœuré et malade, et qu'il repose.

Attiré par l'enseignement, il était à l'Ecole normale d'instituteurs de Constantine en 1941. Engagé volontaire, il a fait, comme tant d'autres, son devoir. Blessé deux fois, titulaire de la médaille militaire. La guerre terminée comme adjudant-chef, il avait épousé Olga Dol qui, elle, était née à El Milia d'un père lui-même né en Algérie, à ]emmapes, et d'une mère aveyronnaise. Institutrice, elle avait débuté en pleine guerre à El Achir (du côté de Lafayette). Leur premier poste de jeunes mariés a été Héliopolis, au sud de Bône.

César, tout au long de sa carrière, a formé des générations de Français de toutes souches et de toutes confessions à l'école Emile Salles, et Olga à l'école Jacquart. Mais leur destin devait évoluer de façon inat­tendue : socialistes tous deux, ils furent déplacés d'office (presque déportés) à Duvivier en 1940. Retraite prise à la suite de cette injustice, ils reviennent à Bougie où Olga meurt, emportée par une épidémie de typhus en 1942. César devient alors agent d'assurances et, à l'occasion, entrepreneur. En novembre 1942, il est arrêté comme gaulliste. De nouveau emprisonné, il ne doit sa libération qu'à l'arrivée des troupes anglaises débarquées à l'Oued Marsa. Malgré son âge, César avait néanmoins été mobilisé à quarante-sept ans, avec son dernier grade de la guerre de 1914 : adjudant-­chef. C'est ainsi que, chargé de la mobilisation à Bridja, il conquiert son galon de sous-­lieutenant à près de cinquante ans. Un record. Lui qui n'avait jamais voulu être séparé de la troupe!

Il devient ensuite, après la guerre, maire de Bougie de 1945 à 1947, puis conseiller général et il le restera jusqu'en 1962, alors à la tête du département de Sétif.

Ses tribulations n'étaient toutefois pas terminées. Gaulliste en 1942, anti-gaulliste en 1958, car il ne crut pas que l'Algérie puisse s'intégrer brutalement dans la France, partisan du statut élaboré par Guy Mollet, il fut à nouveau incarcéré à cette époque comme «  antipatriote », puis en 1962, exilé pendant quatre mois à Alger, par mesure administrative, son influence étant, semble-t-il, jugée trop importante sur les populations kabyles.

Bref, rien ne lui fut épargné: plastiqué par l'OAS, puis plastiqué par le FLN, il voulut tout de même croire en l'Algérie jusqu'au bout, et ne rejoignit Toulon qu'en 1964, complètement écœuré par tout ce qu'il avait vu.

C'est à cette date qu'il accepte (après ravoir refusé pendant dix-sept ans) d'être fait Chevalier de la Légion d'honneur, le 5 janvier 1965, peu de temps avant sa mort. Son fils, Yvan, qui avait été lui-même nommé et décoré en 1963, lors d'une prise d'armes aux Invalides, n'a donc pas eu le temps (ni l'immense bonheur) de lui remettre sa propre croix. Elle aura été, en définitive, accrochée en mars 1996 sur la poitrine de son petit-­fils, Jean-Dominique, président de la Seita, lui aussi né à Bougie, en 1948.

Ainsi, il pourra être dit que, de l'arrière-­grand-père, tailleur de pierres, bâtisseur, arrivé en Algérie depuis sa Lombardie natale en 1880, du grand-père au destin si arrachant, formateur de générations et homme public intransigeant, du père lui aussi ballotté par les événements, qui laissera un nom sur la place financière de Paris, et dans le domaine consulaire, et du petit-fils, digne héritier des traditions d'intégrité, de conviction et de vocation du service public, que son grand-père avait si bien illustrées, la continuité familiale aura bien servi, et Bougie, et l'Algérie, et aussi la France.

Après tant d'efforts en faveur de son Algérie (on pourrait même préciser de sa Kabylie), après avoir été directement éprouvé par tous les remous politiques depuis 1940 jusqu'à sa mort, après avoir, dès 1946, été élu membre de l'Assemblée financière de l'Algérie et membre du Conseil économique, il est remarquable qu'il soit demeuré de 1947 à 1962, en même temps que conseiller général, président de la commission des finances, puis président du conseil général de Sétif, membre du conseil municipal de Bougie, présidé par cet autre grand serviteur de son pays, Jacques Augarde.

 

 

retour à la page des biographies